150 IDÉES REÇUES SUR L’HISTOIRE

Bains publics romains (Image d'illustration)

IL N’Y A PAS D’HYGIÈNE AU MOYEN AGE : Vrai ou faux?

PRÉFACE DE PIERRE BARON DIRECTEUR DE LA RÉDACTION D’HISTORIA

      Le propre des idées reçues est qu’elles ne le sont quasiment jamais par hasard.  L’histoire officielle, celle que les vainqueurs seuls écrivent, a toutes les chances d’être passée par là. En lançant ce qui n’était alors qu’une rubrique dans Historicité voulais montrer à quel point nous en étions toutes et tous, peu ou prou, imprégnés bien malgré nous. Souvent dès l’école. La lecture de ces pages devrait vous en convaincre aisément.

           L’idée reçue dérange car elle révèle bien souvent un savoir erroné. C’est surtout vrai en ce qui concerne les religions (y compris pour le christianisme), mais on peut étendre cette méconnaissance à bien d’autres domaines. Le maître en la matière, souvent imité, jamais égalé, est un certain Gustave Flaubert. Son Dictionnaire des idées reçues abonde en clichés navrants, colportés aussi bien aux comptoirs que dans les dîners mondains, sur l’histoire, la politique, la médecine ou les arts.  Justes dans leur charme féroce. Pertinents parce qu’impertinents.  Un régal, certes un peu cruel, comme celui des micros-trottoirs, mais toujours opérant.

L’idée reçue est d’autant plus insidieuse quelle s’admet facilement : on ne la remet pas en cause. Pire : elle est donnée et reçue comme ayant force de vérité.

L’idée reçue a son mérite.  Celle ou celui qui la réfute avec argument fait toujours son petit effet en société.  Essayez, vous verrez.  Vous allez pouvoir en étonner plus d’un.  A commencer par vous-même ! C’est garanti. Sceptique ? Jetez donc un petit coup d’œil au sommaire de cet ouvrage.

IL N’Y A PAS D’HYGIÈNE AU MOYEN AGE

Les hommes sentent mauvais. Ils ne changent pas de vêtements et les paysans vivent avec les bêtes. Les bains n’existent pas et il n’est pas bien vu, de toutes façons, de se laver : FAUX

L’hygiène existait au Moyen-âge où l’eau était aussi utilisée par plaisir. Inventaires faisant état d’objets servant à la toilette, herbiers pour fabriquer des savons ou enluminures reproduisant des personnes se lavant, sont là pour l’attester. Les traités de médecine et d’éducation de Barthélemy l’Anglais, Vincent de Beauvais ou Aldébrandin de Sienne, moines contemporains du XIIIe siècle, montrent un réel souci de mettre en valeur la propreté, notamment infantile.  L’eau est un élément thérapeutique important tant pour prévenir que pour guérir les maladies.  Les stations thermales se développent et se laver régulièrement est donc recommandé et encouragé.  Les maisons n’étant pas pourvues d’eau courante, les grands lieux d’hygiène sont les bains. Certainement hérités de l’Antiquité, ils ont probablement été remis à la mode par les croisés de retour d’Orient où la tradition avait été conservée.

    Dans les villes, la plupart des quartiers avaient leurs étuves publiques, dont l’ouverture était annoncée par des crieurs au petit matin. En 1292, Paris en comptait vingt-sept mais l’apogée de ces bâtiments se situe au XIV siècle. On en trouve à Bruxelles, Bruges ; en France dans les villes de Dijon, Digne, Chartres, Rouen ou Strasbourg. Certains de ces établissements florissants appartiennent même au clergé. Le prix d’entrée est onéreux et tout le monde ne peut pas se permettre d’y aller souvent. À l’origine, ceux qui s’y rendent se contentent de s’immerger dans de grandes cuves remplies d’eau chaude. Mais le procédé est perfectionné, avec l’apparition de bains saturés de vapeur d’eau. On distingue alors les étuves dites sèches, chauffées par l’extérieur grâce à un courant d’air chaud, et celles dites humides en raison de la vapeur d’eau. Pour se laver on utilise le savon ou la saponaire, plante qui fait mousser l’eau. Pour se blanchir les dents on a recours à du corail ou à de l’os de seiche en poudre.

Le succès de ces lieux est tel que la corporation des étuviers est réglementée avec des prix fixés par le prévôt, l’obligation de tenir l’eau propre, l’interdiction d’accès aux malades et aux prostitués. En effet, les étuves se transforment de plus en plus des lieux de rendez-vous galants. Les bains en commun et les chambres qui sont mis à la disposition des clients favorisent la prostitution. Dès le XIVe siècle, des édits sont pris pour séparer les hommes des femmes mais c’est au cours du XV siècle qu’un changement des mentalités intervient. L’Eglise d’abord dont la morale se durcit et qui voit tout ce qui a trait au corps d’un mauvais œil. Les médecins ensuite, et surtout, qui ne considèrent plus l’eau comme bienfaisante mais comme responsable et vecteur de maladies et d’épidémies. Selon eux, les pores dilatés de la peau laisseraient plus facilement passer les miasmes et les impuretés. La Grande Peste de 1348 semble leur donner raison.

     On se méfie dorénavant de l’eau qui ne doit être utilisée qu’avec modération. Les étuves déclinent puis disparaissent peu à peu. Il faudra attendre le XIXe    siècle et le mouvement hygiéniste pour qu’un nouveau renversement de mentalité se produise.

150 IDEES RECUES SUR L’HISTOIRE- TOSSERI Olivier : Marco Polo découvre la Chine- First Histoire – pp. 130-131

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